C'est l'un des plus grands succès du cinéma d'horreur de l'année passée et c'est encore un assez mauvais film. Cependant, avec l'âge avançant, on a peut-être tendance à choisir de voir le verre à moitié plein, à ne retenir que le positif, à s'adoucir, tout simplement. Alors, plutôt que de perdre mon temps à vous dire tout le mal qu'il y a à penser du premier long métrage de Parker Finn, que l'on devine être une laborieuse rallonge de son court métrage breakthrough, farcie de jump scares ridicules et dotée d'un scénario à coucher dehors, je vais simplement vous signaler qu'on y trouve tout de même une vraie bonne scène et une idée valable. La bonne scène, c'est celle de l'anniversaire du petit neveu binoclard de notre pauvre héroïne psychiatre (celle-ci est victime d'une malédiction, refilée par une de ses patientes, qui lui fait perdre peu à peu le contrôle de sa vie et la rend sujette à de terribles hallucinations). Le jour dudit anniversaire, notre héroïne, en congé maladie forcé, se pointe chez sa débile de sœur le sourire, peu naturel, aux lèvres, avec un beau paquet cadeau pour le gosse. Pour une fois, Parker Finn n'use pas de ficelles faciles et parvient à mettre en place un suspense tout à fait opérant. Nous sommes impatients, complices de l'atrocité à venir, que l'on attend avec ce plaisir typique partagé par les spectateurs de film d'horreur. La tension monte progressivement jusqu'à l'ouverture du fameux cadeau par le gosse, au centre de l'attention d'une importante assemblée d'autres morveux et de leurs parents, tous très propres sur eux. Nous sommes convaincus qu'il y aura une surprise à la clé parce que nous avons bien vu, auparavant, quand l'héroïne s'était rendue au magasin de jouets pour choisir son présent, supposé être un train électrique, la caméra s'attarder, pour clore cette scène qui ne servait donc qu'à préparer le terrain, sur la boîte d'un joujou décorée d'une famille modèle dont chaque membre arbore un très large sourire, motif synonyme ici d'horreur annoncée... Et ça ne manque donc pas. Pendant quelques précieuses secondes grâce, notamment, à une intelligente utilisation du hors champ et une actrice, Sosie Bacon, la fille de Kevin, tout le long irréprochable, nous partageons la terreur ressentie par tous les convives, horrifiés à la découverte de la nature si sordide du cadeau et par la réaction de l'héroïne, frappée d'une folle stupeur. C'est une terreur amusée, agréable, plaisante, car il y a aussi quelque chose d'assez comique là-dedans, surtout quand nous ne sommes pas spécialement sensibles à la maltraitance d'animaux domestiques au cinéma...
Enfin, quelques jours plus tard, l'héroïne retourne voir sa sœur dans le cadre de sa laborieuse enquête sur leur passé commun et, après que sa cadette lui ait gentiment demander de sortir au moins temporairement de sa vie pour ne plus traumatiser encore sa famille, notre psy en pleine descente aux enfers retourne piteusement dans sa bagnole. Parker Finn la filme alors à l'intérieur de l'habitacle, sous le choc, en train d'essayer de reprendre ses esprits, puis nous devinons, dans l'arrière-plan, sa sœur ressortir de chez elle puis s'avancer d'un pas décidé vers la voiture. Son buste finit par envahir tout le cadre de la fenêtre et l'héroïne s'apprête à baisser sa vitre quand, soudainement, la tête de la sœurette tombe à la renverse, dans un angle impossible, et apparaît donc d'un seul coup à notre vue. Elle arbore un sourire hystérique dans ce qui s'avèrera être une énième vision cauchemardesque du personnage principale. L'effet est très inattendu, accompagné d'un son strident inévitable, mais l'idée est assez chouette. C'est un jump scare, un de plus dans ce film qui doit en compter plus d'une dizaine, mais celui-ci mérite au moins d'exister ! Bon, à part ça, RAS : rien à sauver. Smile m'aurait peut-être plu si je l'avais découvert à 10 ans, à l'époque où j'enregistrais les films programmés par M6 dans le cadre des Jeudis de l'angoisse pour les mater dès le lendemain à mon retour du collège. Encore que, j'avais meilleur goût que ça à l'époque (oui, j'aime m'envoyer des fleurs), et je suis à peu près sûr que ce film, dont j'aurais peut-être mieux accepter l'histoire à la mords-moi-le-nœud, m'aurait déjà paru beaucoup trop long. Je ne sais pas ce que fera Parker Finn par la suite, mais ne comptez pas sur moi pour vous en informer.
Smile de Parker Finn avec Susie Bacon (2022)