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Channel: Il a osé !
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Lone Ranger

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Anecdote vraie mais peu connue : Gore Verbinski se rendait tous les jours sur le plateau de Lone Ranger avec des sacs pleins de billets de banque histoire de parvenir à répandre d'une manière ou d'une autre 250 millions de dollars de budget devant la caméra. L'homme était dans un fauteuil avant d'entamer ce film, il venait de réaliser trois épisodes de Pirates des Caraïbes, glanant là près de quatre milliards de dollars de recette et entrant dans le cercle très fermé des réalisateurs les plus rentables du moment, aux côtés de James Cameron, Peter Jackson, Tyler Dupres (le black qui fait des comédies pour blacks qui marchent à mort auprès des blacks) ou Michael Bay. D'où le budget pharaonique alloué au dénommé Goré, réalisateur d'origine malgache, par le studio Walt Disney. Verbinski, tous les matins, en arrivant sur son plateau au guidon d'une trottinette à mille dollars pièce tout en chantonnant le fameux air Still D.R.E. de Dr Dray feat Snoop Doggy Dog, répétait à chacun de ses collaborateurs : "J'ai un boulevaaaaaaaaaard pour détrôner Spielberg".




A regarder le film, on imagine pourtant un conflit d'intérêt entre d'un côté les producteurs de Walt Disney, qui ont manifestement exigé que Verbinski signe un nouveau film d'attraction, un Pirates des Caraïbes bis au farwest, avec son lot de gags à tiroirs bon enfant et de scènes d'action rocambolesques menées par un Johnny Depp grand guignol et cabotin condamné à jouer les Jack Sparow encore un long moment, et de l'autre côté le cinéaste, désireux de s'inscrire dans le genre du western et de le marquer de son empreinte, en signant ce qu'on nous a vendu comme un condensé de tous les films du genre (on s'en tape encore les cuisses), citant sans vergogne Il était une fois dans l'ouest, Le Bon, la brute et le truand ou La Prisonnière du désert, et présentant un certain nombre de scènes violentes baignées par une photographie très sombre et très stylisée. Le film a donc le cul entre deux chaises, et on passe d'une scène où les deux héros tombent d'un train qui déraille à pleine vitesse dans un déluge d'effets spéciaux monstrueux pour se retrouver assis en tailleur avec la banane au milieu des débris, comme dans un cartoon à la con (là où il ne devrait rester d'eux qu'une vague trainée de boyaux même pas identifiable par le FBI), à une autre scène où le méchant du film, reconnaissable à ses cicatrices faciales et à son air mauvais, taille les oreilles au frère du héros, lui fait un sourire mexicain, le viole, lui fait un enfant puis l'étripe. De là, on revient comme si de rien n'était à une nouvelle séquence s'adressant aux nouveaux nés où Johnny Depp, aka Tonto, dialogue avec son cheval comme s'il s'agissait de Petit Tonnerre de Brest dans Yakari. Ce mélange ne prend pas.




Au crédit de Gore Verbinski - et pour prouver notre grandeur d'âme face à un homme qu'on aurait tout de même envie d'éjecter d'un train - il faut reconnaître que le réalisateur a tenté de donner une certaine ampleur à son récit en le dotant d'un schéma narratif pas totalement dégueulasse fait d'allées et venues entre le farwest et le San Francisco des années 30, où un gamin visite un musée dédié à la conquête de l'ouest et, après être passé devant des reconstitutions de grizzlis, de bisons, de rhinos et de dinos, se retrouve nez à nez avec la statue de cire d'un "bon sauvage", qui tout à coup prend vie et se met à lui raconter son histoire. Il s'agit de Johnny Depp grimé en vieil indien, tel Dustin Hoffman dans Little Big Man. Cette introduction nous charmerait presque. D'autant que tous les retours au présent dans le musée sont autant de respirations dans le défilé à la fois exténuant et mal rythmé des aventures de Tonto Scefo et de son copain Ranger. Car le film, en dehors de ça, a tout d'un jeu vidéo effréné et exténuant, surtout dans la dernière scène, festival pyrotechnique où deux trains fous foncent à toute berzingue côte à côte pendant vingt minutes (on se demande pourquoi les ouvriers du chemin de fer naissant se sont à ce point emmerdés à construire deux voies parallèles à dix pas l'une de l'autre sur des kilomètres de distance...), tandis que le Lone Ranger, monté sur son canasson blanc, galope sur le toit des wagons tel Schwarzy dans True Lies, et que Johnny Depp, sorte de Buster Keaton indien (pour lui faire un énorme compliment qu'il ne méritera jamais) passe d'un train à l'autre (les deux machines étant, rappelons-le, lancées à toute allure à flanc de montagnes) en empruntant une immense échelle... Ne cherchez pas.




Durant ce type de scène on repense tout particulièrement aux calmes interludes dans le musée, et on essaie de se dire que Gore Verbinski est peut-être en fait animé de bonnes intentions, mais on pouvait aussi dire ça de Joseph Staline en 1927, et cela ne le dédouane pas d'avoir joué un rôle plus que sombre dans l'histoire du XXème siècle, et d'avoir passé par pertes et profits quelques millions d'usagers. Staline disait : "Un mort, c'est un drame, un million de morts, c'est des stats, un milliard, c'est tout bénéf !". Gore Verbinski s'est fendu d'une réplique du même acabit lors de l'avant-première de Rango en France, au micro de Didier Allouch : "Perdre un euro, c'est un drame, en perdre un million, c'est des stats, en perdre un milliard, c'est tout bénéf !". On ne sait quelle est la part de génie ou d'inconscience qui se cache derrière de telles théories, toujours est-il que Verbinski finit par apparaître comme un anti-capitaliste de première. On est heureux de constater que l'homme ne renie pas son sang communard, hérité de ses arrières-grands-parents polonais, avant que toute la famille Verbinski, qui avait flairé le projet d'Hitler avant l'heure, ne plie les voiles vers Madagascar. Au final, si on refait toute sa vie, on prend Gore Verbinski en affection, car ce communiste parti à Hollywood pour dilapider les fonds des grands studios dans des mascarades cinématographiques de grande ampleur est enfin parvenu à ses fins avec Lone Ranger, qui a coûté près de 500 millions de dollars (marketing inclus, on n'ajoute jamais assez le budget marketing, et Depp est une pompe à fric extraordinaire, y compris pour accorder des interviews toutes connes, affublé de deux montres à chaque poignet, trois foulards, quatre chemises superposées et cinq paires de lunette sur le nez) pour n'en rapporter que 270 en comptant large, worldwide. On appelle ça faire "broken arrow" et ça mérite un petit coup de chapeau. Notre plus grand souhait serait maintenant que Gore Verbinski s'attaque au genre des films de super-héros pour le ravager, tel Jan de Bont, autre européen à la solde du Kremlin infiltré à Los Angeles, qui suicida en son temps le genre des films de maison hantée pour une bonne décade au moins.


Lone Ranger de Gore Verbinski avec Johnny Depp, Armie Hammer et Helena Bonham Carter (2013)

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