C'est l'histoire de deux camés par la vie qui se trouvent. A ma gauche, Bradley Cooper, qui fut élu à l'époque "homme le plus beau du monde". A ma droite, Jennifer Lawrence, propulsée par l'opération du Saint-Esprit "femme la plus cool du monde". Elle remporta aussi l'Oscar de la meilleure actrice pour ce rôle et ceci restera dans l'histoire comme le plus gros hold-up à mains désarmées de l'histoire du monde, et en particulier des Oscars, qui chaque année sont pourtant d'énormes braquages en strass et paillettes. Ces deux success story humaines incarnent pourtant à l'écran deux personnages enfoirés par la vie. L'un est bipolaire, a perdu son travail, sa maison et sa femme, qui le trompait. L'autre est veuve, à l'âge de 14 ans, et possède un caractère extravagant et imprévisible à croquer, dont on nous vante l'originalité alors que c'est le lot de tous les personnages de ce cinéma faussement indépendant américain actuel qui sent le fumier, cet "indiewood" morbide piloté entre autres par les frères Weinstein, ces deux enflures.
Et bien sûr nos antihéros bien typiques vont apprendre à se trouver, cautériser leurs plaies respectives, s'aimer et trouver dans un spectacle de danse parfaitement raté mais ultra touchant le premier accomplissement de la nouvelle vie qui s'offre à eux. Le film culmine évidemment lors du concours final où les deux abîmés s'agitent mochement sur un mix des White Stipes et de West Side Story, entre autres, revus et corrigés par Monsieur Danny Elfman (n'avez-vous jamais eu cette curiosité bizarroïde de taper "Danny Elfman" dans Google Images ? Une photo de l'homme en dit long sur son œuvre). La chorégraphie coiffée-décoiffée des deux écorchés vifs nous pousse à hurler "CALL 911 !", d'autant qu'elle est hachée par un montage à la hallebarde qui sauve, comme dans toutes les comédies musicales hollywoodiennes récentes (rappelez-vous Nine), des comédiens tout sauf danseurs, et fait penser, a posteriori, qu'on n'a peut-être pas passé de si mauvais moments devant #DALS.
Ce film indépendant à l'eau de rose, réalisé par David O. Russell, cinéaste transparent que l'on confond un jour avec Michel Gondry (I <3 Huckabees), un autre avec Darren Aronofsky (The Fighter) et ici avec Jason Reitman (l'auteur des pires romances indés putréfiées comme Juno, Up in the Air, Young Adult), est un mix de Flashdance et Rain Man. Avec un poil plus de chance ou un type moins morose derrière la caméra on aurait eu droit à "Flashman", un nouveau super-héros autiste mais putain d'à l'aise sur le dancefloor. Sauf qu'on a juste eu droit à une grosse saloperie qui a rapporté plus de 236 millions de dollars pour un coût officiel de "seulement" 21 millions, ce qui nous laisse pantois et installe David O. Russell dans un fauteuil avant la sortie assez attendue, avec ses mille bande-annonces par semaine, de American Bluff.
Logiquement, un film comme ça peut trouver son salut dans les acteurs qui forment le couple d'amoureux que l'on doit forcément aimer. Et si la logique a pris, puisque les deux sex-symbols à l'affiche comptent parmi les égéries de l'époque, elle n'a pas fonctionné des masses sur nous, qui ne voyons là qu'un bellâtre sorti de l'Actor's Studio et faisant des pieds et des mains pour s'acheter une crédibilité, et une greluche qui a obtenu le rôle à la dernière seconde, qui agite ses formes pour éveiller nos instincts les plus primaires et dont le "naturel" rend les journalistes gagas, elle qui passe pour un label rouge au milieu de steaks recomposés tels que Megan Fox ou Jamie Foxx. Entre les deux, Bob De Niro, sur lequel nous aurons la politesse de ne rien dire, d'autant que ce n'est pas dans ce film qu'il paraît le plus perdu, c'est dire...
PS. Rech. trad. CDI, plein temps, anglais-français, français-anglais, pour traduire le titre original du film : Silver Linings Playbook. Smic horaire. 10% CP. Femme de préférence, 14-36 ans.
Happiness Therapy de David O. Russell avec Bradley Cooper, Jennifer Lawrence et Robert De Niro (2013)