On a récemment loué le come-back en force de Matthew McConaughey, grand retour qui sera sans doute couronné par un Oscar du meilleur acteur grâce à ce film, et qui trouvera son acmé très bientôt dans le Interstellar de Nolan. Et quand on a fini de lire cette première phrase on se dit que le monde est putain de mal fait. Certes Matthew McConaughey a fait un retour fulgurant sur le devant de la scène, lui qui était le bellâtre au pois chiche dans le crâne des années 90, mais il pourrait bien s'inscrire dans la longue liste de ces acteurs et actrices sacrés pour une chose dérisoire, un triste rôle marqué par une performance physique au sein d'un biopic anecdotique. Alors qu'on aurait aimé le voir unanimement salué et officiellement récompensé pour son rôle dans le Mud de Jeff Nichols, il va sans doute repartir vainqueur face à Leonardo Discarpaccio de bœuf pour Dallas Buyers Club.
Dix piges en moins.
Est-ce que manger une feuille de laitue et deux tranches de jambon par jour, en tout et pour tout, dans le seul but de ressembler à un estocafiche et d'impressionner la galerie, valait vraiment le coup ? Tout ça pour être immortalisé par un Jean-Marc Vallée certes en nette progression depuis son film breakthrough C.R.A.Z.Y., avec l'abominable Jean-Marc Grondin, mais malgré tout dépourvu de toute patte (quelqu'un a dû les lui couper depuis un fameux bail). On imagine Matthew McConaughey penché sur sa feuille de salade, parfois pendant des heures, à la grignoter millimètre par millimètre et à en apprécier chaque nervure, même très discrète. Franchement ça fait de la peine, et ça devrait rappeler à chacun que le très paradoxal métier d'acteur n'est pas qu'un rêve. Notre homme, au fond du gouffre quand il tournait Sahara en 2005, passa pourtant un été entier à palper le cul de Pénélopé Cruz. Désormais en haut des charts, la star n'a même plus la force de lever la main vers le moindre derrière rebondi, seule une belle frisée du marché peut encore le faire se lever de sa chaise roulante. Notre homme, et ça c'est quand même terrible quand on y pense, ne se permettait que trois feuilles de mâche tous les dimanche pour pas crever et tenir jusqu'au clapet endiablé de Jean-Marc Lavée sur le plateau du lundi matin... Inutile de préciser qu'un tel régime, et un tel yoyo d'IMC (Indice Masse Corporelle), même encadrés par les plus grands nutritionnistes du monde, écourtent inévitablement la vie d'un homme d'une bonne décade au moins. Finalement c'est presque la moindre des choses que de refiler une statuette à, sauf notre respect, un connard pareil.
Jared L’Étau est ici plus féminin et plus désirable que sa partenaire Jennifer Garner.
Retour sur le film, non encore abordé. Comme tout biopic, Dallas Buyers Club nous a appris deux ou trois sous-éléments de l'histoire de la sous-culture gay sud-américaine. Il se vendait donc en contrebande du M&M's dans les années 80, seul médicament capable alors de soulager les malades du SIDA. Toute une industrie parallèle destinée à faire commerce de ce remède relatif était entretenue par des clubs florissants, répartis aux quatre coins des favelas, gérés par des travellos et autres tatas qui, grâce à leur implication et leur engagement, ont su faire évoluer la prise en charge des malades du VIH, réduits au statut de simples cobayes par des hôpitaux en cheville avec de grands groupes pharmaceutiques tout-puissants. A la fin du film on se dit : "N'aurais-je pas plutôt dû lire la page wiki consacrée à ces fameux clubs qui donnent son titre au film ?" On ne s'était pas dit ça après Hiroshima mon amour, Danse avec les loups ou Shakespeare in Love. C'est le signe que côté ciné la proposition de Vallée est un poil maigre.
Dallas Buyers Club de Jean-Marc Vallée avec Matthew McConaughey, Jared Letho et Jennifer Garner (2014)