Faut-il être au fond du trou pour lancer un film pareil. Il y aurait une thèse à écrire sur l'état dans lequel on se trouve quand on appuie sur "Play" pour lancer un film comme ça. Sauf pour ceux qui l'ont fait en croyant avoir téléchargé Don't look now de Nicholas Roeg. Tous les autres sont des fumiers et nous en faisons partie ! L'idée de ce film ? Réunir Bellucci et Marceau. Les deux actrices partagent la particularité de cumuler une bonne vingtaine d'années de fantasmes masculins nourris, soit quarante piges de désir inassouvis et plus rarement effleurés, comme par Bertrand Tavernier qui, rappelons-le, avait un regard tout ce qu'il y a de plus normal avant de tourner La Fille de D'Artagnan (pur souvenir de cinéma). Sur le tournage de ce film, le cinéaste français s'est littéralement fracturé les yeux. Qui ne se souvient pas de cette scène où Sophie Marceau retire le haut (sa chemise explose, plus précisément) sous les yeux encombrés de son père incarné par un Philippe Noiret plus ripoux que jamais ? Après cette séquence, vue au cinéma à la sortie du film, sur écran géant, nous étions nombreux à avoir besoin de changer de caleçon !
A chaque coup de clap de Bertrand Tavernier (dont les mirettes commencèrent à cet instant précis à zieuter dans tous les sens), l'acteur ci-dessus, qui à la réflexion n'est pas peut-être pas Philippe Noiret, passait en une fraction de seconde de la position couchée, yeux mi-clos, à la position raidie, arborant les billes les plus exorbitées du monde, celles du clebs de Tex Avery.
Lycéenne au Lycée Henri IV (un assez bon bahut, l'équivalent de la Mosson à Montpellier ou du collège La Reynerie à Toulouse), Marina de Van, la réalisatrice de cette rognure filmique, a ensuite fait la Fémis, avant d'enchaîner les scénarios pour François Ozon (Sous le sable et surtout 8 femmes, qu'elle qualifie de "personal favorite") et Pascal Bonitzer (Je pense à vous). Et puis la voilà propulsée cinéaste, et la jeune femme fait parler d'elle avec ce thriller français (chose assez rare il est vrai) qui se fait fort de réunir deux actrices célébrissimes dans un coup médiatique de grande ampleur. Le film est irregardable, on le sait au bout de quelques secondes, mais il enfonce le clou dans une scène d'un ridicule inimaginable, où Marina de Van a le toupet d'insérer son propre faciès au cœur d'un morphing hideux entre les visages de Sophie Marceau et Monica Bellucci, comme si l'association miraculeuse de ces deux stars internationales à la plastique appréciée depuis la pointe de la Patagonie jusqu'en Terre Adélie devait aboutir à Marina de Vans. L'actrice-scénariste-réalisatrice veut bien sûr placer là un clin d’œil du genre "Emma Bovary, c'est oim", mais, ce faisant, elle se présente comme le chaînon manquant entre la madone méditerranéenne aux formes faramineuses et le charme bien "à la française" de Sophie Marceau, faite égérie de William Wallace par un Mel Gibson plutôt à l'affût sur ces coups-là. Marina de Vanne à deux balles prétend partager un peu de l'ADN de ces deux bombastics, simply fantastics. Let me laugh.
Entre l'idéal italien et l'élégance française : Beetlejuice.
Rappelons que ce film fut sélectionné hors-compétition à Cannes en 2009. Merci Thierry Frémaux. Cette projection cannoise, où le film reçut un accueil congelé, fut vécue comme un cauchemar par Marina de Van qui, une chance pour elle, n'a pas assisté à la projection sur notre canapé, dont elle ne se serait certainement pas remise. Toujours est-il que la réalisatrice poursuit son petit bonhomme de chemin puisqu'elle vient de sortir Dark Touch, titre anglais dont on sent bien qu'il a été trouvé par une francophone à la ramasse. Un autre long métrage irregardable à l'actif de De Van, dont la date de sortie aurait dû rester "prochainement" jusqu'en 2030 au bas mot.
Ne te retourne pas de Marina De Van avec Sophie Marceau et Monica Bellucci (2009)