On se plaint beaucoup, et pour cause, des traductions françaises actuelles des titres de films américains. Mais ce problème n'est pas neuf. En 1965 déjà, In Harm's Way, littéralement "Sur la trajectoire du mal", ou "Dans une sale passe", voire à la limite "Dans la grosse merde", a été traduit en France par Première victoire… Allez piger. Les opérations de sabotage des distributeurs français ne datent pas d'hier. Même si en l'occurrence on peut comprendre que lesdits distributeurs aient eu quelque difficulté à définir ce drôle de film de guerre, signé Otto Preminger, qui s'ouvre sur un bal des officiers, enchaîne avec l'attaque de Pearl Harbor, pliée en cinq minutes, puis passe très vite aux retrouvailles d'un père et de son fils, enchaîne sur les romances parallèles de ce père et de ce fils avec deux infirmières avant de tracer dans le Pacifique sans que la ligne directrice du récit ne soit jamais clairement définie et quitte à ce que tout un tas d'éléments très divers s'emboîtent sans forcément faire suite.
Voyez plutôt : la femme de Kirk Douglas, ivre, le trompe la veille de l'attaque sur Pearl Harbor puis crame aussi sec dans un accident de voiture, sans qu'il n'en soit jamais plus question ensuite. Le fils de John Wayne perd sa jeune compagne, qui se suicide après avoir été violée par Kirk Douglas, lequel, rongé par la culpabilité, part également se suicider, mais en héros : il se jette sur un navire ennemi avec son chasseur, façon kamizake, un comble... John Wayne perd ensuite son fils et séduit une infirmière dont le mari est porté disparu. Le mari de l'infirmière revient mais elle continue de baiser avec John Wayne tout en recommençant à coucher avec son mari, lequel, après une attaque, finit par sauver John Wayne, qui l'en remercie. C'est à se demander si ce film, à la fois mineur et fascinant par sa structure narrative éclatée, n'est pas l'ancêtre des séries guerrières orchestrées par Spielberg, Band of Brothers ou The Pacific, et avant elles du Patient Anglais et des drames romantico-militaires fleuves avec pléthore de stars au casting. "Sur la trajectoire du mal" eut bel et bien fait un meilleur titre... Sauf que Preminger sait non seulement filmer mais aussi, et contrairement à un Anthony Minghella, tenir à distance toute surcharge nocive de pathos larmoyant.
Première victoire d'Otto Preminger avec John Wayne, Kirk Douglas, Patricia Neal, Tom Tryon, Paula Prentiss, Dana Andrews et Henry Fonda (1965)
John Wayne essaie d'expliquer le script à ses sous-officiers.
Voyez plutôt : la femme de Kirk Douglas, ivre, le trompe la veille de l'attaque sur Pearl Harbor puis crame aussi sec dans un accident de voiture, sans qu'il n'en soit jamais plus question ensuite. Le fils de John Wayne perd sa jeune compagne, qui se suicide après avoir été violée par Kirk Douglas, lequel, rongé par la culpabilité, part également se suicider, mais en héros : il se jette sur un navire ennemi avec son chasseur, façon kamizake, un comble... John Wayne perd ensuite son fils et séduit une infirmière dont le mari est porté disparu. Le mari de l'infirmière revient mais elle continue de baiser avec John Wayne tout en recommençant à coucher avec son mari, lequel, après une attaque, finit par sauver John Wayne, qui l'en remercie. C'est à se demander si ce film, à la fois mineur et fascinant par sa structure narrative éclatée, n'est pas l'ancêtre des séries guerrières orchestrées par Spielberg, Band of Brothers ou The Pacific, et avant elles du Patient Anglais et des drames romantico-militaires fleuves avec pléthore de stars au casting. "Sur la trajectoire du mal" eut bel et bien fait un meilleur titre... Sauf que Preminger sait non seulement filmer mais aussi, et contrairement à un Anthony Minghella, tenir à distance toute surcharge nocive de pathos larmoyant.
Première victoire d'Otto Preminger avec John Wayne, Kirk Douglas, Patricia Neal, Tom Tryon, Paula Prentiss, Dana Andrews et Henry Fonda (1965)