Tout le monde en France ou presque a toujours adoré, voire vénéré, Valérie Lemercier. En regardant son dernier film j’ai tout de même fini par me demander pourquoi. Il paraît qu’elle est formidable sur scène, mais en ce qui me concerne je ne l’y ai jamais vue (elle refuse d’ailleurs toute captation de ses spectacles). J’imagine que je ne suis pas le seul pour qui ses performances scéniques restent plus ou moins une légende. Donc l’espèce de sympathie universelle et inconditionnelle dont elle jouit tient finalement de ses frasques sur petite lucarne, quelques sketches de Palace, des apparitions mémorables chez les Nuls et une paire de moments drôles venus nous dérider lors de nos infâmes cérémonies des Césars annuelles (songeons à la parodie de Rabbi Jacob, déjà trop vue, ou à celle du Petit Nicolas, transformé en Petit Nikomouk). Au cinéma, les années 90 qui l'on vue naître lui ont plus ou moins réussi, avec L’Opération Corned-Beef et surtout Les Visiteurs. Mais depuis, et après son "grand" rôle dramatique dans Vendredi soir de Claire Denis, hormis le passable L’Invité, on ne compte plus les horreurs dans lesquelles elle a tourné (et qu'elle a parfois écrites et réalisées), de Palais Royal ! au Héros de la famille en passant par Fauteuils d’orchestre, d’Agathe Cléryà L’amour dure trois ans en ne passant surtout pas par Bienvenue à bord ou d’Astérix et Obélix : Au service de sa majestéà Main dans la main pour finir par 100% cachemire.
Un gag par scène : ici Valérie Lemercier reçoit une louche de purée sur le nez. Dans une autre scène, qui se passe dans un zoo, elle tombe dans le bassin des otaries. Et je pourrais continuer comme ça sur dix lignes au moins, ça vous donnerait le scénar officiel du film.
Pas forcément simple, pour une actrice comique de son genre, de trouver des rôles à sa mesure dans le marasme de la comédie française telle qu’elle se pratique depuis plus de quinze ans maintenant, me direz-vous. Mais quand Lemercier est aux manettes de son propre naufrage, quand elle écrit elle-même le scénario de sa déchéance, plus d’excuses. Et 100% cachemire est une pure infection, qu’on se le dise. Étalage involontaire d’un amour propre démesuré chez notre actrice-réalisatrice, film mal écrit, mal filmé, à peine joué et atrocement mal monté (qui voudrait comptabiliser les temps vides malaisants et les raccords mal foutus qui jalonnent cette horreur ?), ce navet d’envergure oublie même, c’est bien le pire, de nous faire marrer ne serait-ce qu’une fois, par hasard... Mais en fait si, il y a pire : tous les personnages (à l'exception du gamin, qui n'est qu'un triste faire-valoir) sont non seulement des clichés sur pattes mais des raclures finies, à commencer par la connasse qu’interprète Lemercier, directrice hautaine et superficielle d’une revue féminine à la con, femme adultère bourrée aux as et hystérique, elle est notamment prête à réexpédier son nouveau fils russe chèrement payé dans son pays natal pour ne plus avoir à s’en occuper, et ce sans rien dire à personne, pas même à son mari, interprété par l’increvable Gilles Lellouche, qui lui aussi la trompe à longueur de journée, quand il ne gifle pas sa petite sœur ou n'insulte pas sa mère. Sans oublier la collègue de Lemercier, mal jouée (est-il besoin de le préciser...) par Marina Foïs, arriviste et traitre, ou la mère juive de Lellouche, grande bourgeoise raciste imbuvable à deux doigts de buter le chien de la famille en faisant preuve d’une connerie à toute épreuve.
Tous ces personnages ne sont absolument pas aimés par leur auteure, et ne sont donc jamais aimables pour le spectateur, mais, bizarrement, Lemercier semble somme toute les pardonner, en tout cas faire avec, sans trop se poser de questions. S'inspirant d'une histoire vraie (celle donc d'une mère qui, après avoir adopté un petit Russe, a décidé de le renvoyer au bercail), elle a en tout légitimité voulu écrire des personnages bien tartinés, des caricatures pures et dures, histoire de faire son beurre comique sur leur dos, mais, ayant probablement plaqué sur ces figures une part de soi (notamment un rapport disons particulier à la maternité, elle en a causé des tas de fois à la TV), Lemercier a dû finir par prendre ses victimes en compassion et par se retrouver dans une stricte impasse. L'issue de secours, qui ne peut pas en être une, a consisté à filmer toutes ces enflures, qui s’en prennent durant tout le film à d’autres enflures (la nounou libidineuse et violente, la maffia des services sociaux, le voisin versaillais ex-collabo, etc.), sans aller suffisamment loin pour faire rire, dans un film d’une bêtise et d’une laideur à tout rompre. Tout ça pour finalement nous montrer son petit cercle familial de pacotille tout-a-trac réconcilié, dansant et tournoyant au ralenti sur de la musique russe de bon aloi en plein réveillon de Noël. C'est sans doute la dernière chose qu’on pouvait attendre de Lemercier, et 100% cachemerde a de quoi faire largement relativiser toute la sympathie qu’on pouvait jadis avoir pour feu Lady Palace.
Si ce tablier ne vous fait pas pisser de rire, c'est mort.
Tous ces personnages ne sont absolument pas aimés par leur auteure, et ne sont donc jamais aimables pour le spectateur, mais, bizarrement, Lemercier semble somme toute les pardonner, en tout cas faire avec, sans trop se poser de questions. S'inspirant d'une histoire vraie (celle donc d'une mère qui, après avoir adopté un petit Russe, a décidé de le renvoyer au bercail), elle a en tout légitimité voulu écrire des personnages bien tartinés, des caricatures pures et dures, histoire de faire son beurre comique sur leur dos, mais, ayant probablement plaqué sur ces figures une part de soi (notamment un rapport disons particulier à la maternité, elle en a causé des tas de fois à la TV), Lemercier a dû finir par prendre ses victimes en compassion et par se retrouver dans une stricte impasse. L'issue de secours, qui ne peut pas en être une, a consisté à filmer toutes ces enflures, qui s’en prennent durant tout le film à d’autres enflures (la nounou libidineuse et violente, la maffia des services sociaux, le voisin versaillais ex-collabo, etc.), sans aller suffisamment loin pour faire rire, dans un film d’une bêtise et d’une laideur à tout rompre. Tout ça pour finalement nous montrer son petit cercle familial de pacotille tout-a-trac réconcilié, dansant et tournoyant au ralenti sur de la musique russe de bon aloi en plein réveillon de Noël. C'est sans doute la dernière chose qu’on pouvait attendre de Lemercier, et 100% cachemerde a de quoi faire largement relativiser toute la sympathie qu’on pouvait jadis avoir pour feu Lady Palace.
100% cachemire de Valérie Lemercier, avec Valérie Lemercier et Gilles Lellouche (2013)