Ci à gauche, Barbara. Ci à droite, Gold. Ci à gauche Nina. Ci à droite, Hoss. Nina Hoss, une femme Barbara Gold. Nina Hoss devant derrière, donc, sur deux affiches qui sont les deux faces d’une même pièce, que d’aucuns appellent « École de Berlin », et qui s’inscrit pleinement dans ce que d’autres nomment la « Nouvelle nouvelle vague allemande ». Mon petit doigt me dit que cette vaguelette ne fera pas beaucoup de remous et ne laissera que peu de perles sur sa plage, pour couler une métaphore qui s'est néguée dans l'Huveaune. Après de soporifiques années 2000, dans les proches contrées du cinéma allemand, où, côté films populaires, surnageaient de faibles Good Bye Lenin !, La Chute et autres La Vie des autres, les années 2010 ne sont guère plus excitantes de l’autre côté du Rhin. En 2010 même, deux films d’auteurs assez prometteurs nous sont parvenus, Le Braqueur, de Benjamin Heisenberg, et surtout Sous toi, la ville de Christoph Hochhäusler, mais en 2012 et 2013 les deux œuvres majeures qu’on nous a présentées comme les plus dignes représentantes du joyeux renouveau du cinéma allemand, Barbara de Christian Petzold, et Gold de Thomas Arslan, figures de proue de la fameuse « École de Berlin », ont plutôt signé son énième arrêt de mort.
Il se dit que tous ces gens, qui depuis le début des années 2000 ont pris la relève, travaillent ensemble, mettent la main à la patte sur le film du copain, s’entraident. Aucun mal à le croire devant Barbara et Gold, qui se ressemblent énormément, partagent la même tête d’affiche, et qu’on croirait réalisés par le même bonhomme. Un type pas totalement dépourvu de savoir-faire, mais pas totalement pourvu de talent, d’énergie, d’idées et de choses à dire. On s’ennuie horriblement devant les aventures congelées de la froide Barbara, chirurgien-pédiatre dans un hôpital de Berlin-Est en 1980, qui doit s’évader vers l’Ouest avec l’aide de son ami mais tombe amoureuse d’un collègue qui pourrait bien être un espion. Et mon dieu qu’on se fait chier devant les aventures d’Emily Meyer dans les non moins hostiles forêts du Canada, en 1898, où, pionnière embarquée dans la ruée vers l’or avec un convoi d’immigrés allemands désespérés, ladite Emily devra se méfier des traitres et tombera amoureuse d’un guide rapidement rattrapé par son passé. « Après Barbara » comme le dit l’affiche (on aurait aimé lire "Avant Gold" sur l'autre...), énième variation sur l'ombre du mur de Berlin, le western de Thomas Arslan a le mérite de traiter de la conquête de l’or par des immigrés européens, sujet plus ou moins enterré par Chaplin mais peu traité de ce côté-ci de l'Atlantique, même si on préférera revoir mille fois de suite La Dernière piste de Kelly Reichardt que subir une seule fois de plus ce Gold (se prononce Cold) bien plat et sans force. Originaux ou pas, ces deux films torpides se rejoignent in fine dans leur vocation à assimiler le soi-disant nouveau cinéma allemand à un parfait paysage de morne plaine.
Barbara de Christian Petzold avec Nina Hoss, Ronald Zehrfeld et Rainer Bock (2012)
Gold de Thomas Arslan avec Nina Hoss, Marko Mandic et Peter Kurth (2013)