Il y a un moment que je déteste chaque année, c’est le passage à l’heure d’hiver. C’est triste à se foutre par la fenêtre. Le seul équivalent que je puisse trouver, un autre truc récurrent, qui nous fout le coup du lapin chaque année, qui s'acharne à ruiner l'humeur de tout un peuple, plus ou moins à la même période, c’est les films de Woody Allen. Sauf que ça, on peut y couper. Suffit de pas les mater. Pas besoin de déménager. C’est un gros plus des films de Woody Allen sur l’heure d’hiver. Le seul. Et encore. Parce qu’en fin de compte, même quand on a décidé de ne pas regarder ses films, on finit toujours pas tomber sur l’un d’eux, sans vraiment l’avoir cherché, bien au contraire. C’est ce qui m’est arrivé avec le dernier, L’Homme irrationnel, alors que j’avais consciencieusement raté quelques uns des précédents opus du binoclard le plus vétuste de l’histoire contemporaine du 7ème art.
Ce n’est sans doute pas le pire titre de sa filmographie récente, mais mon dieu que ce n’est pas significatif ! D’abord, si vous cherchez à vous marrer, tracez votre route au loin. Pas l’ombre d’un gag ou d’une réplique comique dans ce long métrage. Si vous aimez les personnages bien construits, idem, faites comme le chien de Jean Nivelle, celui qui fout le camp quand on l'appelle. Si vous aimez le cinéma en général, mettez les bouts, hissez la grand voile, zigzaguez au large. Et c’est dommage, parce que c’est néanmoins pas si mal foutu, pas toujours désagréable, malgré le vieux jazz huileux qu’on nous balance à la tronche toutes les quinze secondes environ. Que nous raconte Woody ? L’histoire d’un prof de philo totalement dépressif, alcoolique, drogué, suicidaire, tout ça suite à la mort de son meilleur ami en Irak et au départ de sa femme. Il est incarné par Joaquin Phoenix, qui fait le job, sans se fouler, pépère, affublé d’un gros bide lourdement mis en avant par le port de t-shirts étirés et ridicules. Le type, véritable légende urbaine, fantasme de tous les amphis, débarque dans une nouvelle université où il est tout de suite agressé sexuellement par une prof (Parker Posey), la cinquantaine en manque d’orgasmes, et une étudiante (Emma Stone), la vingtaine franchement impressionnée par le mot « existentialisme » (la philo tourne autour de ce mot selon Woody Allen, tandis que non loin gravitent, brumeux, les noms de Kant et de Heidegger, ce qui en dit déjà long…). Sauf que le docteur ès Simone Sarstre ne bande plus.
Heureusement, Abe, car c'est son nom, retrouve le chemin des filets quand lui et son étudiante à la manque surprennent une conversation dans un bar : une mère de famille se plaint de son divorce et d’un juge malveillant prêt à lui sucrer la garde de ses gosses au profit d’un père irresponsable. Dans la seconde qui suit, le prof de philo pour les nazes décide de mettre un terme à la vie du fameux juge, afin de soulager celle de cette parfaite inconnue qui chialait dans le bar et de donner un sens à sa propre existence (il retrouve illico le goût des aliments, la sensation du grand air et le plaisir universel de la turgescence). Il a déjà donné en matière d’aide humanitaire par le passé, mais tout cela ne sert à rien d’après lui. En prime, c’est pendant qu’il aidait les victimes du tsunami à Taïpeï que sa femme s’est barrée avec son collègue de chambrée. Par conséquent il trouve terriblement plus efficace, pour participer à améliorer la vie sur terre, de tuer un type sur la seule base d’une conversation privée épiée pendant cinq minutes. Ce type qu’on nous a vendu, durant toute l’introduction, comme un puits de science, un esprit brillant, un génie de la pensée, l'équivalent humain du gros cerveau arachnide suintant et rampant qui fout la merde dans Starship Troopers, décide de tout mettre en œuvre pour abattre un gars dont il ne sait rien en se basant en tout et pour tout sur une brève de comptoir. Parlez-moi d’un connard…
Quand c’est là la base du scénario, ma parole, quelque chose ne tourne pas rond. Et quand en prime Woody Allen se sert de tout un tas de ficelles qui relèvent au final de l’énorme cordage de paquebot, voire de la poutrelle en acier trempé, pour justifier que le crime parfait de son héros finisse par rejaillir et l'éclabousser, comme toutes ces conversations quotidiennes autour de la mort du juge, qu’aucun des personnages ne connaissait, et dont tout le monde devrait se foutre (ça vous arrive souvent, vous, de commenter pendant des plombes un petit fait divers minable lu dans le journal avant d’arriver chez vos beaux-parents, et de passer tout le dessert à tenter d’élucider le mystère en famille... mieux, de tomber bizarrement juste ? Sans déconner…), c'est le signe qu'il est vraiment important de remettre l'ouvrage sur le métier pendant quelques années. La fin, que je ne vous dévoile pas, car je reste correct, même après avoir vu ce film, est pathétique elle aussi. Le personnage principal achève de ne plus tenir debout, Emma Stone s’énerve et exprime, à l'aide de ses traits faciaux, cet énervement (ce qui n’est jamais bon pour nos yeux innocents), et Woody Alien use et abuse d’une symbolique lourdaude à souhait, à peu près aussi pataude que le titre même de son film, qui annonce certes la couleur (tout cela n'a aucun sens) mais se révèle d’une prétention démesurée quand on est face à l’objet final.
Woody Allen donne dans le placement de produit abusif et insupportable. Je parle d'Emma Stone.
Ce n’est sans doute pas le pire titre de sa filmographie récente, mais mon dieu que ce n’est pas significatif ! D’abord, si vous cherchez à vous marrer, tracez votre route au loin. Pas l’ombre d’un gag ou d’une réplique comique dans ce long métrage. Si vous aimez les personnages bien construits, idem, faites comme le chien de Jean Nivelle, celui qui fout le camp quand on l'appelle. Si vous aimez le cinéma en général, mettez les bouts, hissez la grand voile, zigzaguez au large. Et c’est dommage, parce que c’est néanmoins pas si mal foutu, pas toujours désagréable, malgré le vieux jazz huileux qu’on nous balance à la tronche toutes les quinze secondes environ. Que nous raconte Woody ? L’histoire d’un prof de philo totalement dépressif, alcoolique, drogué, suicidaire, tout ça suite à la mort de son meilleur ami en Irak et au départ de sa femme. Il est incarné par Joaquin Phoenix, qui fait le job, sans se fouler, pépère, affublé d’un gros bide lourdement mis en avant par le port de t-shirts étirés et ridicules. Le type, véritable légende urbaine, fantasme de tous les amphis, débarque dans une nouvelle université où il est tout de suite agressé sexuellement par une prof (Parker Posey), la cinquantaine en manque d’orgasmes, et une étudiante (Emma Stone), la vingtaine franchement impressionnée par le mot « existentialisme » (la philo tourne autour de ce mot selon Woody Allen, tandis que non loin gravitent, brumeux, les noms de Kant et de Heidegger, ce qui en dit déjà long…). Sauf que le docteur ès Simone Sarstre ne bande plus.
Cette scène-clé, cruciale, le tournant du film, est à peu près aussi platement filmée que tout le reste.
Heureusement, Abe, car c'est son nom, retrouve le chemin des filets quand lui et son étudiante à la manque surprennent une conversation dans un bar : une mère de famille se plaint de son divorce et d’un juge malveillant prêt à lui sucrer la garde de ses gosses au profit d’un père irresponsable. Dans la seconde qui suit, le prof de philo pour les nazes décide de mettre un terme à la vie du fameux juge, afin de soulager celle de cette parfaite inconnue qui chialait dans le bar et de donner un sens à sa propre existence (il retrouve illico le goût des aliments, la sensation du grand air et le plaisir universel de la turgescence). Il a déjà donné en matière d’aide humanitaire par le passé, mais tout cela ne sert à rien d’après lui. En prime, c’est pendant qu’il aidait les victimes du tsunami à Taïpeï que sa femme s’est barrée avec son collègue de chambrée. Par conséquent il trouve terriblement plus efficace, pour participer à améliorer la vie sur terre, de tuer un type sur la seule base d’une conversation privée épiée pendant cinq minutes. Ce type qu’on nous a vendu, durant toute l’introduction, comme un puits de science, un esprit brillant, un génie de la pensée, l'équivalent humain du gros cerveau arachnide suintant et rampant qui fout la merde dans Starship Troopers, décide de tout mettre en œuvre pour abattre un gars dont il ne sait rien en se basant en tout et pour tout sur une brève de comptoir. Parlez-moi d’un connard…
Avant de tuer le juge, Joaquin Phoenix lui lâche une petite perlouse discretos. Tout ceux qui ont déjà commis ce genre d'attentat en lieu public reconnaitront la précision du gestus de ce grand acteur.
Quand c’est là la base du scénario, ma parole, quelque chose ne tourne pas rond. Et quand en prime Woody Allen se sert de tout un tas de ficelles qui relèvent au final de l’énorme cordage de paquebot, voire de la poutrelle en acier trempé, pour justifier que le crime parfait de son héros finisse par rejaillir et l'éclabousser, comme toutes ces conversations quotidiennes autour de la mort du juge, qu’aucun des personnages ne connaissait, et dont tout le monde devrait se foutre (ça vous arrive souvent, vous, de commenter pendant des plombes un petit fait divers minable lu dans le journal avant d’arriver chez vos beaux-parents, et de passer tout le dessert à tenter d’élucider le mystère en famille... mieux, de tomber bizarrement juste ? Sans déconner…), c'est le signe qu'il est vraiment important de remettre l'ouvrage sur le métier pendant quelques années. La fin, que je ne vous dévoile pas, car je reste correct, même après avoir vu ce film, est pathétique elle aussi. Le personnage principal achève de ne plus tenir debout, Emma Stone s’énerve et exprime, à l'aide de ses traits faciaux, cet énervement (ce qui n’est jamais bon pour nos yeux innocents), et Woody Alien use et abuse d’une symbolique lourdaude à souhait, à peu près aussi pataude que le titre même de son film, qui annonce certes la couleur (tout cela n'a aucun sens) mais se révèle d’une prétention démesurée quand on est face à l’objet final.
L'Homme irrationnel de Woody Allen avec Joaquin Phoenix et Emma Stone (2015)