Dans le catégorie encore très en vogue des films de zombies post-apocalyptiques, The Girl With All the Gifts fait partie du haut du panier. Et pourtant, nous n'en avons quasiment pas entendu parler. En France, le film est sorti dans l'anonymat le plus complet en été 2017 alors qu'il était depuis longtemps disponible par des voies alternatives. Pourquoi a-t-il eu droit à un si triste traitement ? Difficile de l'expliquer. Il y a peut-être déjà un problème malheureux avec le titre : The Girl With All the Gifts. Admettons que ça n'est pas très vendeur ni très parlant. En français, c'est devenu "The Last Girl - Celle qui a tous les dons" et ça n'est pas beaucoup mieux. Alors évidemment, c'est mieux qu'un "Apocalypse Zombie 2052" bis ou un truc du genre, mais ça reste un mauvais choix de titre, qui semble condamner le film à passer incognito. Les affiches et autres visuels de promotion qui accompagnent le film sont également très peu éclairants et engageants. On ne sait pas à quoi on a affaire et cela ne donne pas spécialement envie de s'y intéresser. Bref, niveau comm', l’œuvre du réalisateur Colm McCarthy et de son scénariste Mike Carey (également auteur du livre) a sans doute manqué le coche. Et c'est bien dommage, car The Girl With All the Gifts aurait mérité un bien meilleur sort.
En sous-sol de ce qui semble être une base militaire, des gosses en tenues de taulard oranges sont maintenus en cellule et traités comme les plus dangereux des prisonniers. Quand ils sont amenés à sortir pour aller dans une salle de classe situées quelques mètres plus loin, des militaires les tiennent en joue, les placent dans des fauteuils roulants et les attachent de la tête au pied, comme s'ils étaient des petits Hannibal Lecter à surveiller de près. Nous comprenons ensuite qu'ils sont les derniers espoirs d'une humanité foudroyée par un virus qui a transformé tout le monde en zombie du genre vorace et véloce. Ces enfants sont la deuxième génération de zombies : toujours dotés d'un appétit terrible pour la chair humaine, ils sont néanmoins capables de se maîtriser et semblent doter de capacités intellectuelles exceptionnelles. Ils sont soumis aux expériences du Dr Caldwell (Glenn Close), qui essaie de trouver un remède au virus, et ils suivent les cours de l'institutrice, Mme Justineau (Gemma Arterton, l'instit de rêve...), particulièrement fascinée par la petite Mélanie, l'une des gosses du groupe. Quand la base militaire est envahie par les zombies, la gamine, l'institutrice, la docteur et le sergent Parks (Paddy Considine) sont contraints à fuir.
La première partie du film, c'est-à-dire jusqu'à ce que l'on quitte la base, est de loin la plus intrigante et réussie. Les premières scènes parviennent aisément à éveiller notre curiosité tandis que le réalisateur fait preuve d'un certain talent pour nous révéler peu à peu où nous sommes et dans quel univers se place son œuvre. L'invasion de la base par les zombies déchaînés donne lieu à une scène à l'efficacité indéniable dans laquelle Colm McCarthy fait un usage malin de la profondeur de champ. Le cinéaste s'était fait la main sur de nombreuses séries télé, parmi lesquelles Peaky Blinders et Black Mirror, et s'avère habile avec sa caméra. Le casting fait également plaisir à voir. La gamine vedette, Sennia Nanua, dégage quelque chose d'assez troublant. Glenn Close, depuis toujours abonnée aux rôles de peau de vache du fait de sa tronche désagréable, est impec en chercheuse prête à tout pour trouver un vaccin au terrible virus. Paddy Considine est toujours mieux devant que derrière une caméra, comme l'a prouvé son triste Tyrannosaur. Quant à Gemma Arterton, elle est the girl with all the gifs animés tant c'est un bonheur de voir cette gentille dame évoluer à l'écran : même sous un gros pull en laine et sans aucun artifice, l'actrice britannique déploie un sex appeal désarmant.
Si le scénario nous réserve certes assez peu de surprises, il arrive néanmoins à se différencier habilement de la masse des post-apo horrifiques qui se sont répandus sur nos écrans ces dernières années. La transformation en zombie est ici due à une mystérieuse maladie fongique. Dans les rues ravagées de Londres, envahies par une végétation luxuriante, les rescapés découvrent ainsi des branches, champignons et cosses s'échapper d'amoncellements de corps putréfiés de zombies. La BT Tower de la capitale anglaise est recouverte de cette flore étrange et nous offre l'image la plus marquante d'un film qui contient quelques belles trouvailles. La scène où le groupe de survivants doit progresser lentement au milieu d'une foule de zombies amorphes, pour ne pas se faire remarquer, est un moment fort. Les effets spéciaux sont très soignées et sont même assez bluffants compte tenu du maigre budget de cette production. La photographie du film est un autre atout remarquable : des couleurs vives mettent en évidence la campagne britannique et la verdure londonienne, cela rompt intelligemment avec les fades standards du genre, sombres et gris. Le film s’essouffle quelque peu dans sa dernière partie et paraît ne plus trop savoir où nous emmener mais, malgré cela, The Girl With All the Gifts est bien plus malin que la moyenne et saura à coup sûr contenter les amateurs du genre.
The Girl With All the Gifts (The Last Girl : Celle qui a tous les dons) de Colm McCarthy avec Sennia Nanua, Gemma Arterton, Glenn Close et Paddy Considine (2017)