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Channel: Il a osé !
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Les Veuves

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J'y ai cru pendant une bonne heure, puis Steve McQueen et son scénario trop tordu ont fini par me paumer complètement. On retrouve Gillian Flynn, l'auteure de Gone Girl, à l'écriture, et cela se sent. Le pitch de départ est pourtant accrocheur et a priori propice à un polar solide : des veuves de braqueurs tués lors de leur dernier méfait décident de s'allier pour un cambriolage et ainsi régler leurs dettes. Le scénario dévoile progressivement tous ses contours et se veut en réalité très ambitieux. Vers le milieu du film, survient un rebondissement assez énorme qui ne manque pas de nous retourner, mais il se produit au détriment de la cohérence générale et de notre possibilité de croire aux agissements des différents protagonistes... Quand on fait le bilan, on constate aussi qu'il y a de gros courants d'air dans le script si bien huilé de Gillian Flynn.




Fort de ses Oscars emmagasinés pour Twelve Years a Slave et d'une reconnaissance critique déjà acquise, Steve McQueen ne se contente pas d'un simple polar, il tient à jouer sur plusieurs tableaux : le film féministe tout à fait dans l'air du temps et le thriller politique qui dénonce, branché corruption et bavure policière. Au bout du compte, le cinéaste ne choisit pas vraiment de point de vue, dilue trop son récit et échoue malheureusement sur tous les fronts. Son polar manque de pep's et de clarté pour nous scotcher à notre fauteuil. Son propos est un peu trop simpliste pour nous bousculer (en gros, "tous pourris !" nous dit McQueen, d'un côté comme de l'autre). Et ses personnages sont trop voués à être des pantins pathétiques au service d'une intrigue retors pour qu'ils puissent un tant soit peu nous toucher.




C'est bien dommage car il y a quelques idées de mise en scène qui viennent nous rappeler que Steve McQueen peut parfois être un cinéaste inspiré, même quand il s'aventure dans un registre inhabituel pour lui comme l'action. Il choisit alors d'adopter un style assez sec, insistant sur la soudaineté de la violence, sa fugacité, son côté presque accidentelle, et il réussit à produire son petit effet, notamment lors des cambriolages qui ouvrent et concluent le film. Parmi ses inspirations, on retient surtout ce plan-séquence assez ostentatoire mais intelligent et lourd de sens, qui fait suite au discours démago du candidat en campagne donné à la lisière d'un quartier pauvre et délaissé de Chicago. La caméra est littéralement vissée à l'avant de la berline du candidat regagnant ses pénates, elle commence par nous montrer les quartiers pauvres de la ville avant, quelques dizaines de mètres plus loin, d'opérer un simple panoramique pour nous révéler que nous sommes désormais dans les quartiers huppés, là où se trouve son QG, une immense baraque bien chic.




Notons que les actrices sont irréprochables et auraient pu dégager une belle alchimie, mention spéciale à l'élégante Elizabeth Debicki. Hélas, Steve McQueen, trop occupé à mettre en image cette histoire trop compliquée, n'exploite pas suffisamment leur potentiel et nous finissons par regretter de les voir si peu interagir entre elles et agir ensemble. Il y a aussi quelques grands numéros d'acteurs, comme Colin Farrell, infect mais crédible en politicard aux dents qui rayent le parquet, et aussi le grand Robert Duvall, saisissant dans le rôle de son père, un vieux briscard peu fréquentable mais pragmatique et habitué aux manigances politiques. Reconnaissons aussi que Steve McQueen fait preuve d'une certaine humilité en bouclant tout ça en un peu plus de deux heures quand bien d'autres auraient profité d'un tel scénar pour livrer une bobine dépassant allègrement les trois plombes. Mais c'est là un bien maigre compliment, qui permet à peine de relativiser le temps perdu devant ce film pas affreux, certes, mais un peu raté.


Les Veuves de Steve McQueen avec Viola Davis, Elizabeth Debicki, Colin Farrell, Michelle Rodriguez et Liam Neeson (2018)

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