Ce film-là, on ne peut pas l'aborder frontalement. On est obligé de le prendre à rebours, par des chemins de traverse, de choisir des angles précis. S'attaquer à la mise en scène, au scénario, aux décors ou aux effets spéciaux serait trop long, ou trop rapide. Mais les acteurs... Plusieurs questions se posent, presque toutes restent en suspens. Nous sommes, avouons-le, un peu perdus et désemparés après la projection privée de ce film, et avons bien du mal à coucher tout ça sur le papier. D'abord, il faut savoir que cet épisode d'Astérix pâtit cruellement de l'absence de Christian Clavier dans le rôle titre (ça, c'est juste pour qu'on soit les seuls à l'avoir dit, on n'en pense pas un traître mot). Du côté des personnages, Panoramix manque également à l'appel, élément central de la BD il est ici condamné au hors-champ. Qu'on nous enlève le chef du village, qu'on nous prive du barde, qu'on nous supprime le poissonnier, mais pas Panoramix ! C'est l'âme de l’œuvre d'Uderzo et Goscinny. C'est la raison d'être des aventures d'Astérix & Obélix. Alors pourquoi ?... Peut-être à cause d'une malédiction qui plane sur ce rôle depuis la première adaptation de la bande dessinée. Tous les acteurs qui ont prêté leurs traits fatigués au célèbre druide sont aujourd'hui six pieds sous terre, du pourtant fringuant Sim au tonitruant Claude Piéplu en passant par l'unique et inimitable Smaïn : toutes ces personnalités sont mortes, terrassées par leur rôle. Jouer dans cette saga semble épuisant pour les nerfs. Il faut voir la tronche que tire Edouard Baer, d'ordinaire pétaradant. Il est aveuglé par un maigre filet de lumière dans les scènes en extérieur, affichant l'air du déterré qui n'a pas pioncé de la semaine, ou du sniffeur de coke qui voit la vie en noir de chez noir. Il faut voir aussi l'allure fatiguée de Fabrice Luchini, qui paraît avoir 10 ans de plus, même s'il nous offre le meilleur César ever, malgré sa performance minable.
Ça fait tellement de temps qu'on attendait de voir Edouard Baer en Astérix... On en était tout fébriles ! A ce propos, saviez-vous qu'Edouard Baer est le seul acteur de la célèbre saga à avoir interprété deux rôles distincts ? Il était déjà Otis dans le second épisode, le chef d’œuvre oxydé de Chabat. Hélas, nous sommes extrêmement déçus par le traitement réservé au personnage d'Astérix dans ce nouvel opus. Cœur de la BD, véritable poumon des travaux dessinés d'Uderzo, il est ici réduit à une espèce de pervers sexuel qui ne pense qu'à se vider les bourses dans la première anglosaxone venue. Dolores Chaplin doit d'abord faire face à ses avances, puis c'est au tour de la pâle Charlotte Le Bon d'être assaillie par une drôle de teub auréolée d'une moustache blonde remplie d'irréductibles morpions gaulois. Edouard Baer n'a pas l'air dans le coup. Il joue comme s'il était en état d'arrestation pour détention de stupéfiants de classe A. Pourquoi n'ont-ils pas pris un vrai nain pour faire Astérix ? Mimi Mathy était dispo, et pas besoin de la teindre ! Warwick Davis, l'éternel Willow, l'inoubliable Leprechaun, a également un agenda 2012-2013 vierge de toute espèce d'annotation, il était dispo...
Petit tour d'horizon du cas Depardieu. Son nez ressemble à un vié fatigué, dans un sens comme dans l'autre. Soit l'on y voit deux couilles énormes et glabres surmontées d'une verge qui s'épanouit au milieu de son front et se montre très satisfait d'être astiqué à chaque fois que l'acteur hausse les sourcils par à-coups. Soit, à l'inverse, on considère ses "narines" comme les deux sphères d'un gland de dinosaure à l'urètre bien dégagé, suspendu dans le vide, dans l'attente d'une nouvelle cible facile lui tournant le dos à la hâte. Une chose est sûre, l'acteur-star partie dans le froid fout vraiment mal à l'aise.
Un petit mot sur Gillaume Gallienne, qu'on nous avait présenté comme la seule satisfaction de ce ratage total, comme la dynamite humaine de ce film mort-né, comme le vent de fraîcheur soufflant sur le cinéma français. Il est aussi enjoué que tout le reste du cast, c'est à dire qu'il donne l'impression que sa carte bleue a été piratée et qu'on a effectué un retrait en Roumanie d'un million d'euros sur son compte courant et que l'on a vidé son PEL sans préavis. Gallienne, sociétaire de la Comédie Française, participe activement à l'enculage de la bonne humeur et du moral du spectateur. On a juste envie de lui foutre un énorme coup de pied au cul. En parlant de cul, celui de Charlotte Le Bon a visiblement tapé dans l’œil de Laurent Tirard, le pur nullard aux manettes de ce fiasco, désormais expert dans l'adaptation des œuvres de Goscinny (il avait déjà réalisé Le Petit Nicolas), au grand dam de ce dernier, qui danse le smurf non-stop dans sa tombe au Père Lachaise.
Autre interrogation sur le casting : pourquoi n'ont-ils pas mis un vrai black à la vigie du bateau de pirates ? Certes Mouss Diouf est mort et Giant Coucou aussi, mais il restait Omar Sy (seul bémol, de taille toutefois, rajouter un million de dollars de budget au film pour l'entendre rire, et un million pour embaucher Fred, car Omar ne tourne jamais un film sans son acolyte sur le plateau, ou au moins en coulisses), Fabrice Eboué (mais pas assez noir à notre goût), Alex Descas (mais c'est pas tout à fait le genre), et Pascal Légitimus (qui a toutefois pâli avec l'âge). Bref, en fin de compte on comprend. Dans le même ordre d'idée, pourquoi est-ce que l'immigré qu'ils raccompagnent à la frontière est un blanc couvert de cirage et non un vrai black ? Là encore, on ne sait pas. Ceci dit on n'y perd pas totalement au change : seul rayon de soleil dans ce foutoir ignoble, le dénommé Atmen Kelif, éternel fauteuil voltaire d'Edouard Baer, véritable faire-valoir de son maître, figurant à vie du cinéma français (à tel point qu'il n'est que trop rarement crédité et trop rarement payé pour son travail). Qui se souvient d'Atmen Kelif dans Mon Pote ? L'intermittent du spectacle militant est ici très bon dans le rôle du petit paki immigré à moustache, dont l'accent suffit à faire sourire lors de sa première apparition. C'est bien la seule fois que l'on a souri devant ce film, alors cela méritait d'être souligné.
On doit parler des BB Brunes, mais on aimerait plutôt leur faire la peau et leur couper les oreilles. Il n'y a bien que Depardieu qui semble réellement prendre son pied lors du concert final, mais rappelons que c'est très probablement du fait de son addiction connue, reconnue et avérée à la bibine et à tout ce qui relève du liquide fermenté. On termine le film par cette drôle d'image arrêtée où on le voit mimer avec ses poings diaboliques une double fellation surprise. L'acteur avait clairement la baraka. Mais les milliards que coûte cette seule performance improvisée de fin de tournage valaient-ils d'être brûlés ? Rappel du coût de ce film : 60 000 000€ soit $80 000 000, ce que la rédaction de ce blog gagnera en 600 siècles (on est deux rédac' chefs, et pas mal de secrétaires). Au box office, le film s'est écrasé lamentablement en réussissant à faire moins que tous les précédents opus. Sincèrement, on ne pense pas que la 3D sauve le film.
P.S. : Pas un mot sur Dany Boon, Gérard Jugnot ou Valérie Lemercier. Transformez ce silence en un immense mollard qui aurait son nom dans le Guiness Book et qui serait balargué avec un sourire (ce qui n'est pas évident à réaliser) dans la direction de ces êtres dépourvus d'âme depuis qu'ils l'ont vendue au diable. Enfin, quand même un petit mot sur Dany Boon, sachant que sa prestation, d'une durée totale de 10 minutes, et ponctuée en tout de trois lignes de dialogue, lui a été rétribuée la coquette somme de 600 000€...
Astérix et Obélix au service de Sa Majesté de Laurent Tirard avec Edouard Baer, Gérard Depardieu, Guillaume Gallienne, Fabrice Luchini, Charlotte Le Bon, Catherine Deneuve, Valérie Lemercier, Dany Boon, Atmen Kélif et d'autres zonards (2012)