On pourrait vous restituer les premières lignes prononcées en voix off par Tom Cruise lors du pré-générique pour vous planter le décor mais comme il s'agit d'une série de mensonges trompant immédiatement le spectateur, nous préférons ne pas le faire. Pour faire court, dites vous que Tom Cruise est une sorte de plombier de l'espace, mais au lieu de bricoler des chauffe-eaux, il répare des drones veillant sur une Terre dévastée suite à une guerre nucléaire. Il travaille en binôme avec une jeune femme rousse possédant certains arguments qui lui permettent de "tenir" toute la durée de sa mission. Des rêves mettant en scène Olga Kurylenko perturbent toutefois sa quiétude. Une série de pannes anormales détectées chez les drones mène progressivement notre omniprésent héros vers la découverte d'une réalité plus complexe qu'il le croyait. Cela vous avance peu, certes, mais au moins, nous ne vous avons pas menti ni spoilé !
Est-ce qu'un jour Tom Cruise se mettra en ménage à l'écran avec une femme à son image, c'est-à-dire petite, râblée, vieille mais étrangement bien conservée et avec un gros nez ?
Oblivion contentera sans doute les amateurs de SF peu exigeants, notamment grâce à son univers visuel peu original mais plutôt réussi. Rien à dire sur les effets spéciaux, l'aspect des machines, l'état de la planète, le design des vaisseaux, les tenues d'astronautes, ou que sais-je. Pas de problème, l'argent a été bien dépensé et il y a derrière tout ça de sérieux artisans. Mais malgré ce décorum soigné, rien ne s'avère véritablement marquant, car Joseph Kosinski n'offre jamais le temps de nous laisser habiter son décor. Son film démarre en trombe, et le rythme ne faiblit pratiquement jamais. Ce n'est ici pas un compliment, bien au contraire. Joseph Kosinski enchaîne les scènes lourdement explicatives et celles d'action musclée avec la cadence d'une pub ou d'un clip à peine bridée, le tout accompagné par une musique omniprésente signée M83, qui rappelle par sa lourdeur dérangeante les bandes originales signées Hans Zimmer pour Christopher Nolan, en plus électronique. Devant cela, on a bien du mal à rentrer dans le film, malgré son évidente volonté de nous saisir dès ses premières secondes en nous en collant plein les mirettes. C'est bien dommage...
Parfois, certains effets spéciaux sont tout de même un peu ratés, comme ici, Tom Cruise aux côtés d'un de ses supposés clones.
L'efficacité tant recherchée de ce divertissement que l'on imagine concocté en étroite collaboration par sa superstar Tom Cruise et son docile réalisateur est également affaiblie par un scénario finalement fort peu original, qui semble être le fruit de collages plus ou moins harmonieux. Présenté comme un hommage aux films de science-fiction des années 70 par son auteur, Oblivion fait surtout penser au récent et autrement plus humble et réussi Moon de Duncan Jones. On peut aussi penser à 2001, Matrix, La Planète des Singes, et même Wall-E, liste évidemment non exhaustive tant il serait laborieux d'établir le compte exact. Le fantôme du beau Silent Running plane aussi quelque part, au loin, bien au-dessus de cette bouillie. Oblivion peine considérablement à se faire un nom au milieu de tous ceux-là, et apparaît au bout du compte comme une mixture certes comestible mais tout à fait oubliable. On aura ainsi vite fait de ne plus s'interroger sur ses quelques incohérences tant leur souvenir nous aura rapidement abandonné et désintéressé. Bref, Oblivion, ça se mate, à condition de supporter encore Tom Cruise dans le rôle d'un héros messianique hors norme, mais, bientôt, son titre prendra tout son sens.
Oblivion de Joseph Kosinski avec Tom Cruise, Olga Kurylenko, Andrea Riseborough et Morgan Freeman (2013)