Bienvenue dans le haut du panier des films Netflix, ce qui est évidemment un compliment à relativiser... D'ailleurs, His House n'est pas une production Netflix à proprement parler, la plateforme s'est contentée d'acheter les droits de distribution pour mieux proposer le film à ses abonnés à la veille d'Halloween, ajoutant ainsi avec opportunisme un titre horrifique inédit, plutôt intelligent et dans l'air du temps, à son catalogue. Le premier long métrage écrit et réalisé par le jeune cinéaste anglais Remi Weekes s'inscrit en effet quelque part entre le cinéma social britannique et celui, d'épouvante plus en vogue, de Jordan Peele. Nous y suivons un couple de réfugiés qui a fui la guerre civile qui ravageait son pays pour l'Angleterre, où il se retrouve logé dans une maison vétuste, quelque part en banlieue de Londres. Ils ont perdu leur fille durant leur périple jusqu'en Europe et cette perte tragique continue de les hanter, à moins que ce ne soit leur nouveau logement, dont de sombres menaces suintent des murs pourris...
Rencontre du film social et du film de maison hantée, His House apparaît beaucoup plus réussi dans son versant réaliste. Le couple de réfugiés est incarné par deux acteurs charismatiques (Wunmi Mosaku et Sope Dirisu) qui réussissent à être très crédibles dans leurs rôles, en y apportant une belle humanité. Nous ressentons immédiatement de l'empathie pour eux et nous avons juste envie de les voir kiffer, que la vie leur sourit enfin. Les meilleures scènes sont celles où nous les voyons être confrontés au système anglais, fait de contrôles hebdomadaires obligatoires et d'une série d'impératifs qui paraissent contradictoires. Sommés de s'intégrer, les deux réfugiés sont toutefois isolés dans un quartier craignos et il leur est interdit de trouver ce travail qui serait synonyme de source de revenu autre que la maigre pension qui leur est accordée. Continuellement rappelés à leur soi-disant chance de bénéficier d'un vaste logement, plus grand que les appartements de leurs contrôleurs envieux, et dont l'insalubrité est ignorée, leur statut est fragile et précaire. Nous ressentons suffisamment toute la pression qu'ils subissent, leur souffrance et leur manque de repère dans ce nouvel environnement grisâtre et si peu accueillant, qui ne les aide guère à s'affranchir de leur lourd et douloureux passé.
Côté horreur et fantastique, en revanche, c'est un peu moins ça... Comme bien des films de maison hantée, His House est trop répétitif, comme s'il était indispensable de placer des scènes de trouille à un rythme très régulier, histoire de procurer au spectateur les frissons attendus, de ne pas prendre le risque de le perdre ou de l'ennuyer. Bien que ces scènes horrifiques convoquent un imaginaire assez original pour le genre, permettant au cinéaste de nous livrer deux ou trois visions de cauchemar saisissantes, elles sont parfois longuettes et constituent peut-être les moins intéressantes de l'ensemble, parasitées aussi par un penchant pour les jumpscares qui pourra en lasser certains. Le film souffre en outre d'une construction balourde, avec un dernier tiers trop explicatif, trop surligné, laborieux. L'histoire s'avère plutôt solide et son espèce de twist fonctionne assez bien, mais elle échoue alors à nous emporter pour de bon, à plus franchement nous émouvoir. Remi Weekes a cependant le mérite de nous apporter tous les éclaircissements espérés, loin de cette vilaine tendance qui consiste à trop peu en révéler, à épaissir un mystère en réalité bien pratique pour cacher, en vain, les lacunes et la minceur de scénarios paresseux, laissant sur sa faim une audience qui n'est pas dupe. Ici, tout s'éclaire convenablement, certes, mais nous aurions préféré plus de fluidité et de subtilité. Si His House a donc de vraies et louables qualités, proposant même quelques belles choses et exploitant comme il peut une idée de départ originale et intéressante, il est tout de même assez loin de convaincre totalement. Finissons sur une note positive et admettons que cela reste très encourageant pour un premier film.
His House de Remi Weekes avec Wunmi Mosaku et Sope Dirisu (2020)