Faute de grives, on mange des merles, et on finit devant une petite série b ma foi pas déplaisante, sortie directement en VOD au beau milieu du mois d'août. A Good Woman (is hard to find, dans son titre original intégral) est le deuxième long métrage du cinéaste britannique Abner Pastoll, qui s'était déjà fait remarquer par quelques amateurs en 2015 avec Road Games, autre thriller tendu qui se déroulait en partie sur les routes du sud de la France et dont je ne garde qu'un très vague souvenir négatif. Peut-être n'étais-je pas dans un bon soir, allez savoir... Le fait est que son deuxième film est beaucoup mieux passé. J'avais envie d'un truc vite accrocheur, tendu, j'en ai eu pour mon comptant. A Good woman is hard to find aurait même pu être beaucoup mieux que ça si son scénario ne finissait pas par compiler les rebondissements faciles faisant perdre de la crédibilité à son personnage principal sur lequel repose tout le film.
Sarah, petite blonde menue, la trentaine, est la chic fille du titre : elle vit seule avec ses deux enfants depuis la mort de son mari, sans doute impliqué dans les trafics de stupéfiants qui plombent son quartier malfamé de Lisburn (Irlande du Nord). Alors qu'elle mène une existence assez morne, n'ayant pas encore fait le deuil de son compagnon et entretenant des rapports conflictuels avec sa mère, son quotidien se voit chamboulé lorsqu'un petit dealer de pacotille débarque chez elle en pleine nuit pour planquer un important stock de drogue qu'il vient de dérober au ponte de la mafia locale. Le dénommé Tito, un peu débile mais loyal, propose à Sarah de partager le butin de la revente pour s'assurer sa bonne coopération. Leur collaboration se déroule plutôt bien, permettant notamment à la petite famille de mettre du beurre dans ses épinards, jusqu'à ce que tout bascule le soir où un Tito sous influence se montre un peu trop entreprenant envers la jeune maman esseulée...
Avec son héroïne courageuse, cernée et poussée dans ses derniers retranchements par des tocards de tous poils, bas du front et libidineux, le film d'Abner Pastoll s'inscrit tout à fait dans l'air du temps. Il y a peut-être là derrière un brin d'opportunisme, mais je ne m'aventurerai pas davantage sur ce terrain glissant et n'oserai guère qualifier cette œuvre somme toute très modeste de "féministe". Le fait est toutefois que le personnage campé avec conviction par Sarah Bolger, dont l'interprétation sérieuse rehausse tout l'ensemble, est le point fort du film et que les scènes où celui-ci affirme sa féminité, se révolte, quitte à en refroidir certains, sont les meilleures du lot. On prend immédiatement partie pour la jeune femme et on a très naturellement envie que le scénario de malheur signé Ronan Blaney lui lâche un peu la grappe, qu'elle puisse mener une vie tranquille avec sa marmaille et rencontrer un type plus recommandable que cet idiot de Tito.
Il y a d'abord ce moment aussi amusant que tendu où la jeune maman se lance à la recherche de piles dans toutes les pièces de sa maison, fouillant les placards, ouvrant tiroirs après tiroirs, avant de se faufiler, en toute discrétion et en désespoir de cause, dans la chambre à coucher de ses deux enfants endormis pour récupérer celles d'un de leurs jouets électroniques. Ledit jouet menaçant de s'allumer et de réveiller les gosses, le suspense est à son comble, tandis que nous ignorons alors les motivations de leur mère (même si l'on peut déjà avoir notre petite idée...). Une fois sa mission accomplie, la jeune femme retourne sur son lit et enfile les sacrosaintes piles dans son vibromasseur, soulagée de le voir réagir sur commande, pour s'offrir un moment de détente bien mérité. Quelques temps plus tard, le même vibromasseur jouera un rôle déterminant puisqu'il fera office d'arme salvatrice contre Tito lors d'une tentative de viol qui se terminera dans le sang...
Cette scène d'agression sexuelle tant redoutée (dès l'apparition du personnage de Tito, on craint qu'il ne passe à l'acte, son hôte ayant un certain charme et lui environ 2 de QI) est le point de bascule du film. Suite à cela, le scénario prend une tournure de moins en moins crédible et tombe progressivement dans la surenchère. C'est amusant et toujours plutôt prenant, certes, mais c'est un peu dommage, car tout cela est bien trop attendu et facile. L'héroïne doit se débarrasser d'un corps bien encombrant, choisit la méthode dite du "découpage en petits morceaux", et le film s'enfonce alors dans son statut de thriller de seconde zone, efficace et vaguement sympathique, mais surtout outrancier et prévisible. Je dois avouer malgré tout avoir passé un bon petit moment là-devant... Abner Pastoll va droit au but et ne nous ennuie pas une minute. On ressent également une certaine satisfaction devant le spectacle de cette femme qui s'affranchit totalement de la domination masculine et gagne en assurance tout le long du film. Aussi, j'ai depuis ajouté Lisburn à la liste des destinations à éviter. En plus d'être assez moche, ça a l'air sacrément craignos là-bas !
A Good Woman is Hard to Find d'Abner Pastoll avec Sarah Bolger, Edward Hogg, Andrew Simpson et Jane Brennan (2020)