Ce film nous raconte l'exploit réalisé par l'équipe américaine de hockey sur glace qui a réussi à vaincre les invincibles soviétiques lors des Jeux Olympiques d'Hiver de 1980. Une véritable prouesse sportive que les commentateurs ont tôt fait de désigner sous l'appellation grandiloquente de "miracle sur glace", d'où le titre, et qui a même été désignée par la IIHF (Fédération internationale de hockey sur glace) comme le plus bel accomplissement réalisé dans ce sport. Il est vrai que la victoire des jeunes américains paraissait très improbable face aux ogres soviétiques qui dominaient totalement ce sport depuis près de vingt ans avec leur команда мечты (dream team en russe) ultra expérimentée au jeu inégalable. Mais relativisons cet exploit : les américains jouaient à domicile, peinards, rentrant chez eux pour retrouver père et mère après chaque match, tandis que les russes étaient encore en plein jet lag, éloignés de leur famille, sous le choc de la découverte de la société capitaliste américaine, si différente de la leur. Dans de telles circonstances, il n'y a en réalité pas de quoi être très fier de l'avoir emporté de justesse face à une bande de vieux russes désorientés qui avaient simplement hâte de rentrer à la maison. Ce détail précisé, concentrons-nous à présent sur le film de Gavin O'Connor, ici plus en forme que pour le récent The Way Back.
Le générique est à lui seul un véritable tour de force qui cueille le spectateur innocent dans son fauteuil : en deux minutes et dans un gloubi-boulga d'images d'archive étonnant, Gavin O'Connor parvient à synthétiser un siècle d'histoire des États-Unis d'Amérique ! Une histoire déjà bien orientée et fortement teintée de patriotisme, mais après tout, en lançant un tel film, on sait très bien à quoi s'attendre. Gavin O'Connor est bel et bien là pour nous raconter un miracle purement américain, des jeunes hommes venus des quatre coins du pays qui ont su s'unir sous l'aile d'un leader infaillible, leur coach illuminé, pour former une vraie équipe, une "famille", afin de vaincre l'ennemi soviétique sur la glace, en plein contexte de Guerre Froide. Miracle est également un film Walt Disney, les violons sont de sortie et accompagnent chaque moment un peu poignant, chaque scène clé. On ne fait pas dans la dentelle, et nous sommes donc prévenus dès les premières images.
Heureusement, le cinéaste peut s'appuyer sur des acteurs concernés, à commencer par l'irréprochable Kurt Russell dans la peau du célèbre Herb Brooks, qui nous offre le portrait crédible d'un entraîneur surmotivé par un regret personnel, désireux d'accomplir ce à côté de quoi il est passé dans sa jeunesse, une reconnaissance internationale. Il met pour cela en pratique des idées toutes simples mais nouvelles pour les hockeyeurs ricains, en s'inspirant également du modèle russe et des préceptes de Didier Deschamps, à savoir : le bon fonctionnement et la complémentarité de l'équipe sont plus importants que le talent des individualités. Food for thoughts... Les speechs prononcés par Kurt Russell atteignent toujours leur but. L'acteur n'en fait pas des caisses, il n'en a pas besoin. Face à lui, aucune star, les joueurs sont interprétés par des acteurs aux tronches toutes similaires mais plutôt sympathiques, que l'on a recroisées dans rien de marquant depuis.
Le scénario du film a aussi cette qualité qu'il ne s'embarrasse pas d'à-côtés encombrants qui freineraient la progression vers le climax tant attendu, le match contre l'URSS. Pas d'histoire de cœur. Pas de girlfriend un peu gênante. Et même sans cela, Miracle atteint déjà allègrement les deux heures. Les joueurs de hockey restent sur la glace et nous ne les voyons que très peu en dehors. Seule la vie conjugale du coach nous est un peu partagée, mais cela ne parasite pas vraiment le déroulement naturel du film, au contraire même, et le fait que la femme de Kurt Russell soit campée par l'agréable Patricia Clarkson participe beaucoup à la qualité de ces scènes. Il faut ensuite reconnaître un certain savoir-faire à Gavin O'Connor qui parvient sans souci à nous intéresser à cette équipe de hockey et à nous captiver lors des séquences de matchs énergiques et assez bien menées compte tenu de la réelle difficulté de filmer et rendre lisible un tel sport, si rapide et riche en bousculades. Le fameux match contre les soviétiques est à la hauteur de l'attente entretenue tout le long. On retrouve ici l'efficacité dont O'Connor a aussi su faire preuve dans Warrior, cet autre film sportif où Tom Hardy et Joel Edgerton jouaient deux frères amenés à en découdre en ultimate fighting. On retrouve également l'aspect patriote et cette grosseur du trait chers au cinéaste, jamais très finaud.
On attend désormais de pied ferme un film sur le regretté Loulou Nicollin et sa bande qui réussirent à devancer le géant parisien lors de la saison de Ligue 1 2011-2012. Assez disponible, Olivier Giroud pourrait facilement jouer son propre rôle et il s'agirait d'un hommage qui tomberait à pic pour un grand président parti trop tôt. Les dernières images de Miracle nous apprennent d'ailleurs que le pauvre Herb Brooks est décédé dans un accident de voiture avant même la fin du tournage. Une ligne précise "Il ne l'a pas vu. Il l'a vécu" et conclut comme il se doit ce film de sport tout à fait honnête.
Miracle de Gavin O'Connor avec Kurt Russell et sa team (2004)