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Channel: Il a osé !
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Deux minutes plus tard

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Deux minutes plus tard est aux films de voyages temporels ce que Ne Coupez pas ! est aux films de zombies. Le rapprochement est facile mais naturel : tout y invite. Egalement venu du Japon, le premier long de Junta Yamaguchi, qui repose lui aussi sur une prouesse technique qui ne paraît pas vaine ou gratuite, est animé par la même inventivité et le même enthousiasme. Il s'agit de ce que l'on appelle dorénavant un nagamawashi, un petit film de genre au budget ruiquiqui, tourné en un seul jet, phénomène justement apparu sur l'Archipel depuis le succès du zombie flick original et déjanté de Shin'ichirô Ueda. On nous propose ici de suivre les mésaventures du gérant nonchalant d'un petit café de Kyoto qui, un beau soir, découvre que le moniteur de l'ordinateur de sa chambre affiche des images se déroulant deux minutes dans le futur. Il s'aperçoit dans la foulée que l'écran de son café, situé à l'étage inférieur, affiche quant à lui des images du passé, avec toujours le même décalage de deux minutes. Rapidement, un petit groupe d'amis se constitue autour de lui, chacun s'emballe pour cette inexplicable étrangeté temporelle et propose de mener quelques expérimentations... Jusqu'à ce que, évidemment, les choses se compliquent, notamment à partir du moment où l'un d'eux a la chic idée de positionner les deux écrans l'un en face de l'autre afin d'y voir plus loin dans l'avenir et créer un effet Vache-qui-rit temporel (ou effet Droste, comme repris dans le titre original).


 
 
Contrairement à d'autres films du même genre, à concept fort, qui finissent par plier sous le poids de leur idée initiale et de ses conséquences démesurées, Deux minutes plus tard, tel le saut de puce temporel qu'annonce son titre, sait joliment se contenir, ménage intelligemment ses effets et n'est jamais dépassé par son pitch. Son scénario, aussi modeste que malin, est habilement resserré et c'est très naturellement que le paradoxe temporel aboutit, en fin de compte, aux prémices d'une histoire d'amour. Ainsi, Junta Yamaguchi penche beaucoup plus vers l'humour, la légèreté ou la comédie romantique, que le sérieux et le mindfuck que lui aurait aussi permis son idée de départ endiablée. Quand deux agents du futur apparaissent tout à coup pour mettre un peu d'ordre dans la pagaille provoquée par la bande de loustics, ils amènent des principes faciles à avaler et sont immédiatement tournés en dérision avec leur pistolet laser ridicule et leur poudre magique supposée effacer les mémoires trop gênantes façon Men in Black. L'esprit éminemment simple et sympathique du film est résumé là.  


 
 
Tourné au smartphone, avec trois francs six sous, dans un seul décor, par une petite équipe soudée et soucieuse de ne commettre aucun couac – tel nous le montre le générique final, qui nous propose quelques aperçus des coulisses – le film de Junta Yamaguchi allie, comme son sanguinolent prédécesseur, une ambition étonnante malgré des moyens minimes. Comme la longue première partie déconcertante de Ne Coupez pas, Deux minutes plus tard consiste donc en un seul plan séquence. L'inventivité fait tout, et elle est quasi de chaque instant. Ce choix a ici un sens évident, puisque la sensation du temps réel rend tangible et grisante l'expérience vécue aux côtés des personnages : nous sommes presque dans le même état d'excitation. Il s'accompagne aussi d'une petite réflexion ludique sur le cinéma et le pouvoir des images, le libre-arbitre et notre façon d'envisager l'avenir. Bien sûr, Deux minutes plus tard est avant tout une petite parenthèse divertissante et ne creuse pour de bon aucune des pistes évoquées. On est là pour rigoler, principalement, et imaginer, superficiellement, ce que nous ferions dans la même situation. Le dernier lauréat du Prix du Public du Festival du film fantastique de Toulouse est donc un petit régal à savourer d'un trait. On y retrouve exactement les mêmes ingrédients que dans Ne Coupez pas et cela fonctionne de nouveau à plein tube. Sur un rythme trépidant, en à peine 1h08, le film n'ennuie et n'assomme jamais, mais amuse tout le long. On ne peut que passer un bon moment et saluer la malice de la fine équipe aux commandes. On attend désormais le remake miteux de Michel Hazanavicius avec Duris et Bejo ! 


Deux minutes plus tard de Junta Yamaguchi avec Kazunari Tosa, Aki Asakura et Riko Fujitani (2021)

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