Tout au long de sa vie de savant fou, Rick Moranis en a fait des belles. De belles conneries. Les plus mémorables ont été immortalisées sur grand écran, à travers une série de longs métrages aux titres un brin répétitifs mais qui ont tout de même le mérite d'exister. Je veux bien évidemment parler de la série des "Chérie, j'(en ai fait une belle)". Le premier, Chérie, j'ai rétréci les gosses, sorti en 1989 et signé Joe Johnston, génie des effets spéciaux à qui l'on doit Jurassic Park 3, a marqué tous les esprits. C'est un incontournable pour les gamins qui ont grandi dans les années 90 et dont nous faisons partie. On se souvient tous de la fourmi géante, de la grande sœur et... c'est à peu près tout. Mais petit, on était bien scotchés devant ça, 1h30 de tranquillité garantie pour nos parents et, depuis, on a eu la chic idée de s'en tenir éloigné pour en conserver un doux souvenir. Avec un peu de recul, nous pouvons affirmer aujourd'hui sans prendre un grand risque qu'il doit s'agir d'une variation divertissante de la célèbre histoire de Richard Matheson, L'Homme qui rétrécit, qui avait déjà donné lieu à un chouette film de Jack Arnold en 1957.
La suite des gaffes de Moranis, mise en boîte trois ans plus tard par un dénommé Randal Kleiser, a quelque chose de beaucoup plus traumatique. C'est cette fois-ci le bébé qui a été rendu gigantesque par cet abruti de Rick Moranis ! En cela, le titre du film, Chéri, j'ai agrandi le bébé, est un peu trompeur, il devrait s'intituler "Chérie, j'ai fait du gosse un putain de freak de 500 mètres de haut". Cette séquelle est hélas beaucoup moins palpitante, bien plus laborieuse. Pourquoi ? La réponse est simple, logique. Nous ne suivons plus une bande de gosses (dont la grande sœur...) transformés en lilliputiens réduits à devoir survivre dans un banal jardin devenu jungle impénétrable et menaçante, mais un immense gosse tout-puissant qui a l'air encore plus débile et dangereux avec sa monstrueuse tronche de cake dépassant tous les buildings. L'enfant roi par excellence, celui que l'on a envie de claquer d'entrée. Et que peut-il arriver à un énorme môme dominant la ville du haut de ses 2 ans d'âge mental et de ses 36 étages de peau graisseuse ? Pratiquement rien... Ceux qui sont en-dessous, en revanche, ont les foies de leurs vies ! Ils passent 89 minutes à esquiver les affreuses godasses maladroites et les mains baladeuses du bébé qui, pour ne rien gâcher, se situe en plein dans l'âge où l'on porte tout connement à la bouche pour vérifier si ça se digère et quel goût ça a. Et puis un gosse de 18 mois, ça n'arrête pas de se vautrer sur le cul : je vous laisse visualiser mentalement ce que représente, pour l'honnête citoyen arpentant la ville, la perspective de mourir écrasé par un gigantesque cul de bébé emmitouflé dans une couche garnie à ras-bord de fientes xxl...
En dehors de l'heure et demie de torture douce que constitue cette suite ratée, il y a un autre aspect du film qui torture l'esprit après coup, des années plus tard. Car petit, je n'y pensais pas, mais désormais, si. Nous y avons pourtant tous songé devant L'Attaque de la femme de 50 pieds, le cerveau masculin est ainsi fait : notre imagination galopante s'aventure forcément vers les attributs gigantesques de la dame, ses seins comme deux montagnes laiteuses et sa teucha comme un antre fascinant, réplique exacte de la grotte de Chauvet. Mais, pour le garçonnet... Vous avez pensé à tout ça ? Imaginez la mini-teub géante du môme... C'est à vous glacer le sang... Pour ne rien gâcher encore, rappelez-vous que l'enfant est aussi dans cette période compliquée où l'on se paie des mini gaules gratis et difficiles à apaiser à la moindre marque d'attention maternelle. Or, pour rappel, sa mère passe tout le film à lui faire des signes, à lui rappeler qu'elle est là et qu'on va trouver une solution pour le rapetisser. Heureusement que l'élastique tient bon... Grâce à lui, ou malgré lui, nous restons dans la pure horreur suggestive, celle qui titille notre imaginaire malade et nous fait sursauter en pleine nuit, tout suant. Entre 1989 et 1992 mes cauchemars ont changé, passant de la mort en boucle de la fourmi géante, trauma encore innocent, à la micro-érection surdimensionnée du bibendum-nourrisson...
Pour boucler la boucle, lors du troisième film de la saga, Rick Moranis se rétrécit lui-même avec sa femme et un couple d'amis innocents, venus simplement passer un dimanche en leur compagnie, dans une sorte de remake inavoué du premier opus. Réalisé par Dean Cundey, le brillant dirlo photo des plus grands (Carpenter, Spielberg, Zemeckis et, plus récemment, Sandler), Chérie, nous avons été rétrécis fut diffusé directement à la télé en été 1997 histoire de ne pas provoquer la colère tenace des spectateurs et éviter tout échauffourée en salles. Rick Moranis et sa chérie finissent encore une fois dans un bol de cheerios à faire de grands gestes ridicules avec leurs bras, prêts à être gobés tout rond par Mila Kunis, dans un de ses premiers rôles filmés. On a de la peine pour eux et on est bien contents d'apprendre que le quatrième film n'a jamais pu voir le jour, Rick Moranis ayant ce coup-ci rétréci toute l'équipe de tournage... Con de Moranis !
Chérie, j'ai rétréci les gosses de Joe Johnston avec Rick Moranis et Marcia Strassman (1989)
Chérie, j'ai agrandi le bébé de Randal Kleiser avec Rick Moranis, Daniel et Joshua Shalikar (1992)
Chérie, nous avons été rétrécis de Dean Cundey avec Rick Moranis et Mila Kunis (1997)
Chérie, nous avons été rétrécis de Dean Cundey avec Rick Moranis et Mila Kunis (1997)